Le rhino perdu d'Houphouët-Boigny

Valérie Bony, BBC Afrique, Abidjan

Rhinocéros, Côte d'Ivoire
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Les habitants des villages de Frondobo et Djamalabo cohabitaient tranquillement avec le rhinocéros.

L'harmonie n'est pas toujours de mise entre des villageois du sud de la Côte d'Ivoire et un rhinocéros, survivant d'une vaste réserve animalière créée dans les années 80 par le président ivoirien Félix Houphouët-Boigny (1905-1993).

En prélude à la célébration de la Journée mondiale du rhinocéros, ce 22 septembre, notre correspondante à Abidjan, Valérie Bony, est allée voir comment l'un des survivants de cette espèce cohabite avec des villageois.

L'animal, qui fait partie d'une espèce en voie d'extinction, s'est échappé de la réserve, comme tant d'autres, lorsque la clôture s'est abîmée en 2002.

Depuis lors, il se promène dans la région de Dimbokro, dans le sud de la Côte d'Ivoire, à environ 250 kilomètres d'Abidjan, la capitale économique.

Les habitants des villages de cette région cohabitaient tranquillement avec le rhinocéros, mais l'harmonie est mise à mal depuis que l'animal a mortellement agressé le chef du village de Frondobo en août dernier.

Aka Kassy, l'un des doyens du village de Djamalabo, s'inquiète de la présence du rhino.

"Il bloque l'accès à nos plantations. Quelquefois, il tue nos animaux domestiques. C'est un danger. Tout le monde a peur de cet animal. On l'évite. Nous souhaiterions, pour que tout le monde puisse vivre en sécurité, que l'animal soit parqué, avec l'accord des autorités", commente M. Kassy.

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A Frondobo, il est possible de voir le rhinocéros brouter tranquillement les herbes, près des maisons.

Le vieil homme craint toutefois que l'animal disparaisse du terroir. "C'est un animal précieux. La preuve : beaucoup de nos enfants n'ont jamais vu de rhinocéros. Il peut attirer des touristes chez nous", tient-il à souligner.

De Ndiamalabo, notre correspondante est allée à la recherche du rhinocéros, en suivant sa trace, en compagnie d'un habitant du village.

Après une longue et infructueuse recherche aux alentours de Djamalabo, elle se dirige vers Frondobo, un village situé à cinq kilomètres. Là, elle aperçoit enfin le rhinocéros en train de se promener tranquillement sur un terrain, à quelques mètres du village.

"Enlever l'animal de ce village, c'est nous retirer un trésor", avertit un habitant de Frondobo, malgré la difficile cohabitation entre les villageois et le rhinocéros.

Daouda Traoré, un vétérinaire, président de l'ONG Secours et protection des animaux, est préoccupé par la survie de l'animal.

"Sa protection doit être assurée. Ce rhino est une richesse pour les villageois", lance M. Traoré, qui souhaite qu'un abreuvoir, une mangeoire et un enclos soient aménagés à Djamalabo pour faciliter la cohabitation avec l'animal.

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Dans certains villages situés près de la réserve animalière de Félix Houphouët-Boigny, le rhinocéros fait partie des sujets de la palabre.

Sa présence dans ce village inquiète l'un des habitants. "On ne peut plus s'approcher de lui. Au début, c'était beau et amusant de le voir", témoigne-t-il.

Selon le vétérinaire, l'animal n'est pas dangereux. "Le rhino n'est pas agressif. Il n'a pas changé de comportement. Je l'ai approché, j'étais à dix, voire cinq mètres de lui. Mais il ne m'a pas chargé", raconte-t-il.

A Frondobo, le rhinocéros broute tranquillement les herbes, à une cinquantaine de 50 mètres des habitations.