Burkina : une situation économique toujours compliquée
Yacouba Ouédraogo, BBC Afrique, Ouagadougou

Un marché du Burkina Faso
En octobre 2014, de violentes manifestations de rue poussaient au départ précipité le président d'alors, Blaise Compaoré. Dans la foulée, on a assisté à une vague de casses et pillages qui ont contribué à mettre à mal une économie dont la santé n'était pas reluisante.
Un jeune homme, gérant d'une quincaillerie, nous confie : "Tu peux faire deux ou trois jours sans rien vendre. Tu vas faire comment ?"
Une vendeuse de mèches se plaint, elle aussi : "Vraiment, ça ne va pas du tout. Tu sors, tu ne peux même pas avoir 500 francs CFA. Ce n'est pas la peine. Il faut qu'ils (les dirigeants du pays) revoient ça, hein".
"L'argent ne circule plus", s'est même écrié un chef de parti politique de l'opposition.
Abdoulaye Tao, un journaliste économique, s'est intéressé de près à la réalité du monde des entreprises au Burkina. "Le truc insidieux, c'est qu'aujourd'hui les gens travaillent à crédit. Les petites et moyennes entreprises sont obligées, pour ne pas arrêter leurs activités, d'honorer des commandes dont elles ne sont pas sûres du paiement dans les délais indiqués. Tout est au ralenti. Les entreprises sont en train de s'endetter pour maintenir leurs activités", constate-t-il.
Les pertes directement imputables à l'insurrection ont été estimées à près de 200 milliards de francs CFA par l'institut Free Afrik, spécialisé dans la recherche économique. Mais en réalité, ce sinistre n'a fait qu'aggraver une situation économique qui était déjà difficile.
Le déficit commercial ne cesse de se creuser
La combinaison de plusieurs facteurs, tels les chocs exogènes consécutifs à la baisse continue des cours des matières premières, ou encore l'épidémie d'Ebola dans la sous-région, a conduit à un ralentissement de la croissance économique au Burkina Faso.
Selon les données de l'Organisation mondiale du commerce, le déficit de la balance commerciale du Burkina Faso n'a pas cessé de se creuser. En 2013, il a été de 2 187 millions de dollars, environ 1 093 milliards de francs CFA.
Une vendeuse de charbon au Burkina Faso, où l'économie est dominée par le secteur informel.
La Banque mondiale a évalué à 4 % le taux de croissance du produit intérieur brut (PIB) du pays en termes réels, en 2014. C'est nettement en-dessous de la moyenne de 6 % enregistrée au cours de la décennie précédente.
Selon le Programme des Nations unies pour le développement, 83 % de la population continue de vivre en situation de "pauvreté multidimensionnelle".
Tous les avis sont unanimes : pour que les conditions de vie s'améliorent, il faut une relance de l'économie burkinabè. Abdoulaye Tao estime qu'il revient à l'Etat de donner le ton : "Il faut un déclic psychologique pour que l'économie reparte, notamment la consommation."
L'une des mesures dites concrètes, qui a été prise par le gouvernement pour relancer l'économie, est de payer la dette intérieure, celle que l'Etat doit payer aux entreprises privées. Une mesure qui ne s'est pas encore matérialisée.
Instaurer la confiance
Pourtant, c'est un passage obligé, selon le professeur Amadou Yaro, directeur général de l'Ecole nationale des régies financières. Il signale que "la solution primaire réside d'abord dans la confiance qu'il faut instaurer entre les différents acteurs économiques". "Je pense qu'il faut que les pouvoirs publics fassent les efforts nécessaires pour éponger une bonne partie de la dette intérieure."
Les 7 et 8 décembre, va se tenir à Paris une conférence internationale des partenaires financiers du Plan national de développement économique et social (PNDES), le nouveau programme de développement économique du Burkina Faso.
Les autorités burkinabè espèrent par ce biais mobiliser 15 000 milliards de francs CFA pour disposer des moyens de développer le pays.